Aller au contenu

Erwan Gouadec [Trans Musicales] : « Avec l’augmentation des financements privés, on invente de nouveaux modes de participation »

À l’occasion de la 44e édition des Trans Musicales de Rennes, Erwan Gouadec le directeur délégué de l’association revient sur l’histoire de cet événement atypique qui mêle avant-gardisme et rendez-vous populaire.  Être en mesure, début décembre, de rassembler près de 60 000 spectateurs autour d’artistes émergents : c’est le pari sans cesse réussi par l’association des Trans musicales. Cette année, 82 artistes sont montés sur les planches bretonnes. Si l’événement met la musique à l’honneur, c’est plus largement à la…

Temps de lecture

6 min

Trans Musicales 2022

À l’occasion de la 44e édition des Trans Musicales de Rennes, Erwan Gouadec le directeur délégué de l’association revient sur l’histoire de cet événement atypique qui mêle avant-gardisme et rendez-vous populaire. 

Être en mesure, début décembre, de rassembler près de 60 000 spectateurs autour d’artistes émergents : c’est le pari sans cesse réussi par l’association des Trans musicales. Cette année, 82 artistes sont montés sur les planches bretonnes.
Si l’événement met la musique à l’honneur, c’est plus largement à la rencontre des cultures – aussi bien artistique, qu’anthropologique – qui est valorisée du festival. D’ailleurs, ces rencontres ne se cantonnent pas uniquement à la première semaine de décembre et l’association propose, en plus du festival, pas moins de 500 actions tout au long de l’année. Retour sur ce qui fait le succès de l’événement.

« Notre modèle, c’est l’hyper avant-gardisme et la fidélisation du public »

Cette année, le festival a lancé une démarche de contribution environnementale. En quoi cela consiste-t-il ? 

Le développement durable et l’écoresponsabilité sont historiquement très présents dans l’histoire et le projet que défend les Trans. Je me souviens que les premières actions en ce sens remontent à 2005, alors que la question n’était que très peu abordée dans les autres festivals. Malheureusement, même si ça fait plus de quinze ans qu’on s’efforce à réduire notre impact en diminuant nos déchets et nos émissions carbone, il faut constater que la pollution qui émane de l’événement n’est qu’en partie compressible. Par exemple, le transport des artistes et des visiteurs reste la première source de rejet de CO2. On est parti du principe que, si on ne peut pas effacer nos émissions, il est possible de calculer le coût que représente ces dernières. La contribution environnementale, c’est de proposer à toutes les parties prenantes du festival, qu’ils soient spectateurs, entreprises partenaires, bénévoles ou même artistes, de participer au remboursement du coût de l’événement. L’ensemble des sommes collectées est alors distribué à des initiatives locales spécialisées dans les économies d’énergies.  

Comment les Trans Musicales ont-elles réussi à conserver leur identité pendant plus de quarante ans ? 

Probablement par la grande curiosité qui est inhérente à l’organisation du projet. Jean Louis Brossard, le directeur artistique des Trans Musicales et le fondateur de l’événement, se démarque vraiment par sa connaissance des musiques actuelles, mais aussi du blues, du jazz. Ce bagage culturel, c’est vraiment ce qui nous permet de rester à la page, de découvrir plein de jeunes groupes, sans nous perdre dans les différents effets de modes. L’événement lui doit vraiment son caractère avant-gardiste.
Je dirais aussi que nous gardons depuis nos débuts, une très forte attention à l’entretien des liens avec notre environnement social, technologique et artistique. À l’origine, dans les années 80, le festival présentait principalement des artistes rennais ou français, qui n’avaient que peu de lieux où se produire. Ensuite, dans les années 90, quand l’industrie du disque était extrêmement puissante et soutenante, on a exposé énormément d’artistes internationaux comme Ben Harper, Björk et même les Daft Punk qu’on a vu jouer sans casques ! Au début des années 2000, avec la démocratisation d’internet, il a fallu réinventer la recette. Notre modèle aujourd’hui, c’est l’hyper avant-gardisme et la fidélisation du public. À mon avis, on ne pourrait plus créer de festival comme le nôtre de nos jours.

“ La dimension environnementale devient vraiment prédominante pour nos partenaires ”

Cette transformation a-t-elle fait évoluer le business modèle du festival ? 

On a connu plusieurs phases distinctes. Il faut savoir que la première édition était en fait un concert de soutien à une association aux finances défaillantes. L’idée était simplement de demander aux copains de venir sur scène et de dire au public « Vous donnez ce que vous pouvez, ça aidera l’asso ». En tant que tel, il n’y avait pas vraiment de modèle économique, on présentait un chapeau et on attendait de voir combien ça nous rapporterait. C’est seulement en 1984 que le festival a obtenu le premier financement de la municipalité. Dans les années 80, le terreau politique était propice au développement des musiques actuelles. Jacques Lang au ministère de la Culture a grandement participé au financement de ces dernières. Puis dans les années 90, on a constaté un âge d’or des financements des marques d’alcool et de tabac. L’ambiance dans cette décennie était au sponsoring et aux placements produits. Aujourd’hui, les contributeurs privés ont un peu changé leur fusil d’épaule et cherchent autre chose au travers de leur participation financière.

On parle beaucoup de baisse des financement allouées à la Culture qu’en est-il pour les Trans ?

Depuis une grosse dizaine d’années, on constate une stagnation, voire une diminution des financements publics. Ces derniers représentent un peu moins de 50% des 3,7 millions d’euros engagés pour l’édition de 2022. Le reste du budget se répartit de manière égale entre le mécénat, les partenaires privés, les bars, la restauration et la billetterie. Ce qui est intéressant, c’est qu’avec l’augmentation des financements privés, on invente de nouveaux modes de participation. On est sorti de la logique du placement produit. Les entreprises qui se rapprochent de nous le font en support et reconnaissance de ce qu’apporte le festival pour le territoire. Beaucoup de partenaires nous soutiennent aussi pour l’innovation qui est au cœur de notre projet. Par exemple, bien avant l’explosion des Metavers, on a été le premier festival de musique à présenter un concert en direct sur Second Life dans les années 2000.

Quels sont les arguments qui comptent pour vos mécènes et partenaires ? 

Je pense que la dimension environnementale devient vraiment prédominante. C’est un sujet qui touche de plus en plus de personnes et nous l’avons bien senti, notamment dans les soirées que nous avons pu organiser pour nos entreprises partenaires. Concernant la partie mécénat, nous avons la chance de pouvoir compter sur des mécènes fidèles depuis de nombreuses années. Ils ont grandi avec le festival. Plus largement, les entreprises y voient souvent un levier de « Team Bulding » et une opportunité d’associer leur image à celle des Trans Musicales. Dans ce cas, le partenariat se traduit par exemple par la co-organisation d’un événement spécifique comme un concert pour les enfants des collaborateurs.

 

(crédit photo :  kokomo 2022, cc Elodie Le Gall)

Articles similaires

All
  • All
  • Arts visuels & Art de vivre
  • Cinéma & Audiovisuel
  • Édition
  • Jeux vidéo
  • Mode & Création
  • Musique & Spectacle vivant
Togo Ligne Roset

L’Iconique fauteuil Togo Ligne Roset

So Good Festival

So Good Festival à Marseille : La French Touch partenaire du festival qui s’engage pour un avenir durable

Intervention de Philippe Guillaud, CEO de MatchTune, dans la Bulle Touch à l’Accor Arena de Bercy lors de Big9.

BIG10

Delta festival 2024

Delta Festival : la French Touch partenaire de la 10e édition

Faire défiler vers le haut