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Table ronde Notre-Dame-de-Paris à We Are French Touch : « Les visiteurs sont émerveillés de voir que tous ces métiers du Moyen-Âge reviennent à Notre Dame »

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Table ronde Notre-Dame-de-Paris

Table ronde « Notre-Dame de Paris, emblème de l’imaginaire créatif et du savoir-faire français » lors du We Are French Touch organisé par Bpifrance à la Maison de la Mutualité.

 

La journée We Are French Touch organisée par Bpifrance a permis de mettre un coup de projecteur sur le chantier de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris. A presque un an de sa réouverture, la French Touch a souhaité pour l’occasion mettre en lumière les métiers qui y œuvrent autant que la programmation inédite autour de la cathédrale, de son architecture et de son histoire. Compte-rendu de la table ronde « Notre-Dame de Paris, emblème de l’imaginaire créatif et du savoir-faire français ».

En attendant la fin de sa reconstruction prévue dans un an, Notre-Dame de Paris n’aura pas complètement disparu de la scène et encore moins de l’imaginaire collectif. Plus de trois ans après l’incendie ravageur la cathédrale n’a même jamais cessé d’exister pour le visiteur qui ose franchir les frontières du réel. Visite virtuelle, exposition augmentée, « escape game »… Grâce à la force du digital français et un élan créatif inédit, témoin du dynamisme de la French Touch et de son avance dans les métiers de l’artisanat et de la culture digitale, des compagnons de France aux réseaux de start-ups et des studios de créations, l’emblématique monument, son histoire, son architecture ainsi que les métiers qui l’ont bâtie, se (re)découvrent non sans émotion. C’est ce que nous racontent les intervenants de la table ronde « Notre-Dame de Paris, emblème de l’imaginaire créatif et du savoir-faire français » modérée par Marie Yanowitz-Durand, directrice de la communication, du développement et de la programmation culturelle de « Rebâtir Notre-Dame de Paris ».

 

Dominique Niel, directrice générale des Ateliers de France : « On peut commencer par un métier manuel et finir à la tête de son entreprise »

« Les Ateliers de France forment un ensemble de 53 PME (réparties dans 12 pays à travers le monde) spécialistes des métiers de la restauration du patrimoine et des bâtiments de haute décoration. Des gens passionnés et extrêmement fiers de leurs chantiers, comme celui du Grand Palais, du Château de Villers-Cotterêts, bien sûr de Notre-Dame, ainsi que d’ensembles modernes axés sur le luxe, comme l’hôtel Cheval blanc à la Samaritaine. Les Ateliers de France représentent 2500 salariés dont 1900 compagnons. Notre raison d’être, c’est le travail de la main. Nos métiers sont divers. Sur le chantier de Notre-Dame, on s’occupe de la charpente de la Nef. C’est aussi de la couverture, des décors de façade, tous les métiers de l’intérieur comme les boiseries et les décors peints, etc. Le chantier de Notre-Dame est exceptionnel par sa taille, par l’ampleur des travaux, par la multitude des métiers impliqués. Un chantier très bien organisé qui s’est déroulé en trois phases : la phase de sécurisation, puisque la cathédrale aurait pu s’écrouler, les arc boutants menaçant de s’effondrer. Il fallait aussi que le site soit dépollué et que soient mis en place des capteurs pour vérifier si la cathédrale allait bouger pendant les travaux. Puis une phase d’étude avec des tests en laboratoire pour décider des protocoles de restauration. S’en est suivie la phase des travaux à proprement parler, avec l’intervention d’un cortège d’experts, tailleurs de pierre, sculpteurs, spécialistes des peintures murales, menuisiers, ferronniers… Enfin la phase de lots techniques puisque il va falloir électrifier la cathédrale, installer le chauffage… Ce qui représente, pour nous, jusqu’à 200 compagnons à temps plein, avec des pointes à 600 dans la cathédrale, et pratiquement autant dans les ateliers à la périphérie, à Anger pour la charpente, dans les carrières… Ce ne sont que des passionnés, beaucoup de jeunes qui se sont manifestés spontanément. Il faut savoir que certains compagnons peuvent travailler comme au Moyen-Âge : la charpente de la Nef a été taillée à la doloir avec ces haches spéciales maniées par des charpentiers venus des Etats-Unis, du Canada, de France aussi, les seuls à maîtriser ce savoir-faire. Dans ces métiers où le recrutement n’est pas simple, pour preuve certains pays d’Europe comme le Danemark où les tailleurs de pierre ont disparu, il est essentiel de susciter des vocations. Mais les chantiers emblématiques comme celui-ci intéressent ! On avait déjà vu cela sur le chantier de l’hôtel Lambert, sur l’île Saint-Louis, où des jeunes mettaient leur CV dans la boîte aux lettres pour venir travailler. Donc on a beaucoup de demandes, mais ce n’est pas suffisant… Il faut faire beaucoup plus pour intéresser les jeunes, des journées portes-ouvertes, les Journées du Patrimoine, etc. Le travail de la main, c’est quelque chose de bien. Et je le dis, si jamais il y a des jeunes dans la salle : on peut commencer par un métier manuel et finir à la tête de son entreprise. »

 

Deborah Papiernik, senior VP New business chez Ubisoft : « Notre-Dame brûle : une expérience VR de très belle qualité suscitant beaucoup d’émotions »

« Notre lien avec Notre-Dame ne date pas de l’incendie, mais de la sortie de notre jeu vidéo « Assassin’s Creed Unity » sur la Révolution française en 2014. Avec « Assassin’s Creed Unity » – la série de jeux vidéo historiques vendue dans le monde entier avec des dizaines de millions de joueurs – nous recréons des mondes immersifs avec l’aide d’historiens, de géographes, de sociologues… On s’attache à reconstituer la vie quotidienne, tout ce qui fait que le joueur sera engagé dans l’histoire. Parmi nos personnages principaux figure Notre-Dame de Paris à travers une représentation 3D pas à 100% exacte mais la plus fidèle possible qui a demandé 5000 heures de graphisme sur la base de plans, de visites sur place… A tel point que ces images 3D de la cathédrale issues du jeu ont été largement partagées sur les réseaux puis repris par les journaux, les chaînes, au lendemain de l’incendie. Ubisoft a contribué financièrement à la reconstruction, mais on a aussi mis le jeu Assassin’s Creed à disposition gratuitement des gamers. Il fallait aller plus loin : l’idée est venue d’en faire une immersion en réalité virtuelle. Une expérience de cinq minutes dans la cathédrale grâce un casque VR. On est téléporté sur dix points de vue différents et on finit même par un tour en ballon au-dessus de la cathédrale. Ce projet s’est monté très vite, six mois après l’incendie alors qu’on ne savait toujours pas si la cathédrale tiendrait debout. « Notre-Dame de Paris, voyage dans le passé » est une expérience de très belle qualité pour un large public. Elle été vue partout avec beaucoup d’émotions. Finalement on l’a mise gratuitement sur les stores VR puis elle a été intégrée à l’exposition dans la Crypte archéologique de Notre-Dame et dans le réseau des micro-folies, ces musées digitaux (400 sur le territoire français) du ministère de la Culture. L’aventure a continué avec Jean Jacques Annaud qui préparait son film « Notre-Dame brûle ». Il souhaitait que l’on réalise un jeu vidéo, ce qui aurait demandé quatre ans de travail. Je lui ai proposé plutôt de réaliser un « escape game » dont le but serait de sauver Notre Dame en une heure. A débuté une collaboration étroite avec lui et ses équipes : il nous a partagé le scénario du film, il a invité mon équipe sur les tournages pour qu’ils s’imprègnent de l’émotion de Notre-Dame, il nous a aussi présenté les pompiers qui étaient sur l’incendie pour que notre expérience soit la plus réaliste possible. L’escape game «  Notre-Dame brûle » est opérée aujourd’hui dans environ 700 salles dans le monde. »

 

Morgan Boucher, Global Head Metaverse x XR x web3 chez Orange : « Éternelle Notre-Dame : l’axe-clé était de respecter l’exactitude historique »

« Notre histoire avec Notre-Dame est une aventure incroyable. Dès le lendemain de l’incendie, le monde entier a été ému. Il a eu un élan de solidarité pour aider à la reconstruction à laquelle nous avons participé financièrement. Mais Orange souhaitait contribuer à cette émotion en apportant un complément qui puisse être utile à court terme : rouvrir virtuellement ce lieu emblématique afin de pouvoir continuer à le visiter. Le développement de ce projet de visite immersive en réalité augmentée avec différents partenaires français a duré deux ans. On ensuite a imaginé un modèle économique dans lequel les visiteurs contribuent à la restauration à hauteur de 30% du prix du billet. Tout l’enjeu était d’avoir un équilibre entre la dimension culturelle et la dimension historique, avec une manière d’accueillir le grand public de la meilleure manière possible. L’axe-clé était de respecter l’exactitude historique. La question de la grammaire et de l’interaction était centrale : pour nous aider à bien concevoir l’expérience, les équipes du Diocèse et notamment deux historiens nous ont accompagné pour l’écriture du scénario. De fil en aiguille on a affiné le propos, avec une dimension contemplative, une autre historique, dans un format divertissant et familial. L’expérience de 45 minutes a été d’abord montrée à La Défense, le temps que l’espace de 1000 m² sous le parvis de Notre-Dame pouvant accueillir une centaine de visiteurs soit accessible en janvier 2023. Aujourd’hui c’est 100 personnes par heure, des familles, des touristes français et étrangers, des écoles. On est frappé de voir comment le public, en particulier les jeunes, adhèrent. L’expérience est maintenant aussi à Taiwan, bientôt en Amérique du Nord, en Asie, donc on sent une appétence du monde entier pour ce lieu emblématique. L’émotion a été le fil rouge pendant ces deux années de développement. »

 

Bruno de Sa Moreira, CEO et cofondateur de Histovery : « Notre Dame de Paris en réalité augmentée : cette visite est aussi une présentation des savoir-faire »

« Chez Histovery, nous étions en discussion en 2019 avec les équipes de Notre-Dame de Paris pour concevoir une visite augmentée sur le même format que ce qui existe au Château de Chambord, à la Conciergerie… Suite à l’incendie, l’idée est venue d’explorer un nouveau format : une exposition itinérante qui pourrait voyager et permettre de revivre l’histoire de la cathédrale. Le projet est donc né, « Notre Dame de Paris en réalité augmentée », rendu possible grâce au groupe L’Oréal qui en a financé le développement et la carrière internationale. Un tiers est dédié aux visites des chantiers de reconstruction touchant tous les métiers et savoir faire et permettant de voir la haute construction à l’œuvre. Le visiteur parcourt 850 ans d’histoire, depuis sa construction au Moyen Age, jusqu’à aujourd’hui et demain, sa reconstruction. La difficulté première fut le nombre d’experts à réunir afin de couvrir l’étendue du champ historique, soit un comité scientifique d’une quarantaine de personnes. La production 3D a été ensuite très importante pour justement que le visiteur ait accès à ce chantier pharaonique de l’époque et qu’il ait aussi la possibilité d’un parcours personnel qu’il choisit lui-même puisque la visite est interactive. D’ailleurs pour tout voir, il faudrait y passer une journée entière… C’est l’une clé du succès du projet : on peut venir en famille, avec enfants, grands-parents, ou entre amis, et chacun composer sa propre visite pour ensuite on en parler. Un moment de culture vivante et une expérience profondément documentée, solide, sérieuse et instructive qui s’adresse particulièrement au secteur de l’éducation. Le projet a d’abord été montré en 2021, à Dubaï, dans le pavillon France de l’Exposition Universelle. On a alors été frappé par la diversité des publics. Aujourd’hui l’exposition a voyagé dans sept villes (dont Paris, Montréal et Mexico) et le projet c’est d’aller jusqu’à 15 villes jusqu’en décembre 2024 avec des lieux emblématiques comme l’Abbaye de Westminster et le National Palace Museum à Séoul. Il faut savoir enfin que dans chaque expo on fait des mises à jour pour raconter où en est le chantier. C’est une partie importante. Les visiteurs sont émerveillés de voir que tous ces métiers du Moyen-Âge reviennent à Notre Dame. On l’a vu à Dubaï avec l’exemple du cordiste qui fait rêver les enfants. Cette visite est aussi une présentation des métiers et des savoir-faire d’entreprises qui viennent du monde entier pour reconstruire le monument. »

 

Revivez l’événement We Are French Touch édition 2023

 

 

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