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Les tiers-lieux : royaume de l’interdisciplinarité

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5 min

Cesure

Comme le montre leur cartographie, les tiers-lieux continue leur expansion aux quatre coins de la France à rythme effréné. Mais quel est le rôle de ces sites protéiformes posés à la croisée des chemins et des métiers ? Nous avons visité le dernier né à Paris, Césure, installé sur l’ancien campus de Sorbonne Nouvelle.

Ces lieux d’un genre nouveau se nomment Ground Control (près de la Gare de Lyon), Cité Fertile (à Pantin), le Hasard Ludique (dans le 18ème), ou encore Vive les Groues ! (à Nanterre). A Paris comme en périphérie, dans la France entière, en campagne ou en ville, ces adresses ont pour point commun d’échapper au cadre. Ni squat, ni friche… Tout à la fois résidence d’artistes, espace de coworking, fablab, cantine locavore, incubateur à impact positif… Elles nous mettent au défi d’appréhender l’époque sous un nouvel angle.

Césure : le tiers-lieu de transmission des savoirs et des savoir-faire

Pour en saisir le fonctionnement, rien de tel qu’une virée, à Paris, sur l’un de ces sites les plus récents, dans le cinquième arrondissement, à la lisière du Jardin des Plantes. Sur l’ancien campus de Sorbonne Nouvelle, et ses 25 000 m2 de salles de classe et d’amphithéâtres veille école, Césure a pris son envol à la veille de l’été, enchainant, avec succès, les deux évènements phares de la saison, la Nuit Blanche et la Fête de la Musique. Grâce à une programmation de concerts, d’ateliers, de projections de film et autres expériences culturelles immersives, le public fut au rendez-vous. Né ainsi sous de bons hospices, ce nouveau tiers-lieu coche toutes les cases de ce concept-ovni apparu autour des années 80 aux Etats-Unis.

Le tiers-lieu se distingue du lieu de travail et du domicile, et s’oppose au lieu de consommation. On le définit aussi comme un espace de sociabilisation neutre permettant de faire des rencontres. Dans l’Hexagone le mouvement a pris racine il y a environ dix ans, principalement grâce au développement du numérique et des espaces de travail partagés. Son rôle, depuis, n’a eu de cesse d’évoluer…

Comme on le constate à Césure qui, à peine lancé, assure déjà toutes ses fonctions : le site mélange les usages et les publics (étudiants, associations militantes, entreprises de l’économie sociale et solidaire, artistes, artisans et simples voisins), propose du coworking à bon prix (les anciennes salles de classes, en location à 20€ le m2, sont occupées par 400 occupants triés sur le volet), met à la disponibilité de tous, dans le quartier, des espaces de détente (cantine, friperie Emmaüs, machines à café, tables en terrasse, vaste espace d’exposition)… Et, comme il se doit, sous les pavés du tiers-lieu : une portée militante. Césure s’investit dans la « transmission des savoir et des savoir-faire ». Pour ce lieu hybride l’enjeu n’est pas seulement de créer et de divertir, mais aussi de déjouer, le temps de sa présence, la pression de la « gentrification » et d’insuffler la possibilité d’un nouveau lien social.

« Notre rôle est de faciliter le fonctionnement de l’intelligence commune »

Dans quelques années il faudra rendre les clés, puisque le site, mené principalement par Plateau Urbain, en partenariat avec Yes We Camp, deux opérateurs de tiers-lieux, auxquels s’est associée la conciergerie solidaire Aurore, est voué à terme à retrouver sa vocation première universitaire. Le temps pour Césure de mettre en place un « projet commun » à grand renfort de réunions mensuelles entre l’ensemble des occupants… Ainsi, en juillet, était débattue la gestion de la canicule dans les locaux du site sans climatisation, ou encore l’adoption d’un chat par le collectif.

Il sera aussi  question des derniers détails d’organisation du week-end d’inauguration, début septembre, ouvert au public. « Nous n’imposons rien, explique Victor Houillon, représentant de Plateau Urbain. Notre rôle est de faciliter le fonctionnement de l’intelligence commune, entre les occupants, autour des mêmes valeurs. Et pour faire émerger des idées, entre architectes, artistes, designers, urbanistes, artisans, rien ne vaut les rencontres informelles, à la buvette ou sur la terrasse ! ». Ici réside l’enjeu, et même la force, des tiers-lieux : l’hybridation de profils, de métiers, de secteurs et même de générations ! Là où ailleurs on travaille encore en silo, le tiers-lieu célèbre l’interdisciplinarité.

Selon cette volonté les tiers-lieux se sont multipliés dans la France entière, et particulièrement depuis la pandémie. Groupement d’intérêt public dédié à leur observation et à leur soutien, France Tiers-Lieux dénombre environ 3500 sites, un chiffre en croissance de plus de 20% depuis le précédent recensement en 2021. Plus qu’un mouvement marginal, un phénomène de société ? « Sur les enjeux de la transition écologique, et même de la transition alimentaire, les tiers-lieux ont un rôle d’innovation à l’échelle locale et permettent bien souvent d’agir concrètement sans attendre les grands plans de la puissance publique », défend Yolaine Proult, déléguée générale de France Tiers-Lieux, heureuse de pouvoir citer plusieurs exemples aux quatre coins de la France, comme dans la Drôme où le tiers-lieu de la Fab Unit a repensé la chaine de production de mobiliers autour du réemploi des déchets plastique.

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